Eradored d'Ylnalaen

Bien que la lignée d’Ylnalaën soit aussi ancienne que le Saint Royaume, il fallut attendre le cycle de grâce 1245, pour qu’enfin les descendants de l’Érudite n’accèdent à la noblesse d’Ithoria, avec l’avènement d’Eradored d’Ylnalaën, dit le Boiteux.

Contrairement à ses aïeuls qui étaient pour la grande majorité des hommes de savoir, hommes d’église avertis, dans la tradition qui s’étaient créée au sein de la famille après la disparition d’Ewëlleneth, Eradored avait choisi la voie des armes en rejoignant la Sainte Armée, et il l’espérait, devenir un jour Paladin.
C’était un temps troublé. La grande guerre venait de débuter entre l’empire et le Saint Royaume, et le jeune soldat avec son régiment d’infanterie fut immédiatement envoyé en renfort des troupes qui venaient de prendre pied dans Escania l’Impériale cité. Alors qu’il était enfin arrivé au front, son entrain et sa détermination vacillaient déjà. Pour parvenir à la cité conquise, lui et ses compagnons d’arme avaient du traverser la lande dévastée, où les corps de jeunes hommes, tant ithorien que Kohrien, étaient devenu les repas d’innombrables charognards. Un paysage d’horreur comme jamais il n’en avait vu. Enfin ils entrèrent dans la moitié de cité qui était contrôlée par la Sainte Armée. Mis à part le bruit étouffé des combats et les rares patrouilles, elle était déserte. Toutefois, il n’était pas venu en visiteur en ces lieux et cela, le Paladin à la tête du régiment d’Eradored le leur fit bien comprendre. Immédiatement, ils allèrent relever un régiment à proximité du pont, où se déroulait la majorité des combats.

Ce ne fut à aucun moment une partie de plaisir, tant chaque jour l’ennemi venait tester les troupes ithoriennes, emportant avec lui la vie de nombreux braves et pieux soldats. Mais ce qui fit la gloire d’Eradored et lui apporta son surnom fut un combat particulier, violent, chaotique et meurtrier. C’était le 23eme jour depuis son arrivée à Escania. L’Empire venait de recevoir le renfort des mages de la confédération honnie et leur nouveau général avait décidé qu’il était temps de repousser les ithoriens hors des frontières de l’empire. L’aube s’était levée et une âpre odeur de sang flottait, présageant une journée funeste pour tous les soldats présents. L’armée ithorienne venait à peine de terminer l’office de résurrection que déjà les cors impériaux sonnaient la charge. Les rares troupes qui étaient déjà à leur poste furent balayées comme autant de fétus de paille par la furie ennemie, les mages impies donnant une puissance de feu rarement égalée à l’armée impériale, qui rapidement prit pied sur la berge ithorienne. C’était les premiers instants du combat et déjà la débandade semblait inéluctable. La Sainte Armée n’avait pas le temps de s’organiser, l’hérétique ayant profité de l’office matinal pour se mettre en place, obtenant ainsi un avantage non négligeable.

Eradored avait vainement essayé de rejoindre ses camarades, se frayant difficilement un chemin vers la position qu’ils étaient sensés tenir. Il n’y parvint jamais, alors il se plaça sous les ordres du premier officier qu’il croisa sur sa route. Par chance pour l’avenir de sa lignée, il s’agissait d’un Paladin très connu et proche du Prêtre-Roi. Ainsi au côté des hommes qui s’étaient rangés sous la bannière de ce héros, ils purent contenir une charge imposante de l’ennemi, permettant ainsi à d’autres régiments de se réorganiser et de rejoindre en ordre la bataille. Alors que, finalement le cours des événements semblait enfin sourire à la Sainte Armée, un carreau d’arbalète faucha le Paladin Commandeur, le faisant tomber de cheval et le blessant lourdement. Abattu par la perte de l’un de leurs charismatiques paladins, les soldats commencèrent à reculer à nouveau. L’enfant d’Ylnalaën fut bientôt l’un des derniers à tenir bon, protégeant leur supérieur blessé, qui gisait au sol dans une mare de sang. Il sauta sur le destrier dont venait de tomber le blessé… et tous furent surpris de son aisance sur cette bête imposante. Il virevoltait tranchant, amputant, massacrant tous ceux qui essayaient de s’approcher. Mais ils étaient trop nombreux pour lui et les rares qui restaient encore debout. Et bientôt, il fut à son tour toucher par une flèche ennemie, qui sectionna un tendon de sa jambe, le rendant infirme à vie. Il ne cessa pas pour autant de combattre avec acharnement jusqu’à épuisement, jusqu’à ce que quelques infirmiers puissent apporter le blessé en lieu sûr. Ce fut chose faîte après quelques minutes supplémentaires d’un combat héroïque. Eradored recula enfin et rejoins lui aussi l’hôpital de campagne, exsangue.

Il fut évacué, avec son nouveau commandeur vers les terres d’Ithoria où des soins plus propices pourraient leur être prodigués. C’est dans cet hôpital qu’ils apprirent qu’Escania avait été reprise après plusieurs jours de combats acharnés. Mais finalement les ithoriens avaient du battre en retraite. Le paladin fut le premier à être guéri et à pouvoir partir au front à nouveau. Toutefois, il prit bien garde d’envoyer à la cour de Kival ses recommandations pour Eradored, demandant au Roi de faire de lui un Paladin à part entière et de l’anoblir. Malheureusement la blessure du descendant de l’Érudite ne lui permit pas d’accéder à son rêve, il était devenu infirme à vie et boitait lourdement, se déplaçant difficilement. Il n’eut que la maigre consolation de voire enfin sa lignée reconnue comme celle descendant d’une Sainte et termina ses jours à Kival la Sainte au sein des nobles dont il faisait maintenant parti.

Eradored est connu au sein de la famille d’Ylnalaën comme le fondateur de la lignée. Depuis sa mort, chaque fils aîné est entraîné à devenir un cavalier hors pairs et un homme de lettre accompli, en hommage à la Sainte par qui tout à commencé.